Nucléaire iranien: recherche accord désespérément
Les discussions sur le nucléaire iranien ont repris - sans les Américains. Un défi majeur pour les Européens.
La renégociation avec l'Iran a recommencé, à Genève, avec l'ardente obligation de durer moins longtemps que la fois précédente - il avait fallu douze ans pour parvenir à l'accord du 14 juillet 2015, formalisé sous le nom de JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action, Plan d'Action Global commun).
Or, face à Téhéran, les pays concernés - Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne - se retrouvent dans un contexte complètement différent.
It doesn't look good, and Iran is in a pissy mood.
L'aveuglement de Trump
L'Iran, avec lequel "les négociations sont extrêmement dures", selon l'aveu même d'un diplomate russe chevronné, fait sciemment monter la pression en laissant croire à un compte à rebours fatal.
Le négociateur, le roué ministre des Affaires Etrangères, Mohammad Javad Zarif, est porteur d'une feuille de route très complexe.
Que Donald Trump ne veut visiblement pas comprendre.
Le président américain a affirmé sans sourciller : "L'Iran n'est plus le pays qu'il était il y a quelques mois. Il y a là-bas un tout autre groupe de leaders".
Avec sa finesse habituelle, il a ajouté : "Ils ne regardent plus vers la Méditerranée autant qu'avant... Ils sont moins portés sur ce qui se passe en Syrie, sur ce qui se passe au Yémen et sur beaucoup d'autres endroits".
En l'occurrence, c'est exactement l'inverse.
Un mouvement avait été initié à la faveur du JCPOA ; l'année 2017 s'était soldée par un taux de croissance économique de près de 10%.
De nombreux modérés commençaient à en tirer profit pour contrer les conservateurs, toujours vent debout contre l'accord de 2015.
C'est ce mouvement-là qui s'arrête.
Pour le reste, le régime poursuit inexorablement ses menées extérieures.
Hossein Salami, un des commandants des Gardiens de la Révolution, le corps d'élite du camp des durs, a estimé le mois dernier que le Hezbollah, allié indéfectible de l'Iran au Liban, disposait maintenant de 100 000 missiles prêts à détruire Israël.
Le pouvoir des mollah se raidit
Le Guide Suprême Ali Khamenei, dont le pouvoir se situe au-dessus de celui du président, Hassan Rohani, vient de déclarer qu'Israël est toujours une "tumeur cancéreuse".
En Syrie, on a dénombré en juin trois soldats iraniens tués, ce qui prouve qu'ils continuent à se battre hardiment aux côtés de Bachar Al Assad.
Plusieurs signes démontrent que l'Iran s'est adapté au durcissement de Trump par un renforcement de sa stratégie agressive.
Quant aux difficultés économiques qu'affrontent le pays, elles ne provoquent rien d'autre qu'un raidissement du pouvoir des mollahs.
Pour célébrer la fin du Ramadan le mois dernier, Ali Khamenei a appelé ses concitoyens à se priver, à se serrer la ceinture et à ne plus voyager à l'étranger pour sauvegarder la monnaie nationale en danger.
A destination de ceux qui prônent la fin de l'isolement, en renonçant à la course au nucléaire, le Guide a lancé : "Ceux qui défendent l'idée, en suivant la propagande ennemie, que le peuple est fatigué et épuisé sont eux-mêmes fatigués. Ce sont eux qui sont épuisés".
Dans un pays où tout augmente, la population en vient à contester ouvertement les autorités, jugées incompétentes, mais sans qu'aucun espoir de changement de régime en découle.
On a déjà vu où la contestation spontanée, non construite, conduisait ; en 2009, les jeunes dressés contre la corruption et les manipulations électorales du médiocre Mahmoud Ahmadinejad eurent droit à une répression en bonne et due forme.
Il n'y a pas de force (ni d'idéologie) de coagulation de l'opposition, en Iran ; la seule option de variation provient de l'ouverture vers l'extérieur - encore n'est-ce qu'une hypothèse, mais elle méritait d'être tentée comme le voulait la logique du JCPOA.
Contrairement aux rodomontades de Donald Trump, ce sont seulement les très frêles signaux de libéralisation qui sont frappés de plein fouet.
A moins d'un nouvel accord sur le nucléaire iranien, c'est le pire aspect de la République islamique qui reprendra le dessus.
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